Nous sommes au
Congo-Kinshasa, dans le milieu des années 50, des jeunes gens se révoltent face
à la brutalité mentale et physique qu’est le colonialisme. Ces jeunes représentent
l’élite intellectuelle de leur pays, ils font partis de la première vague de
diplômés Congolais que compte le Congo-Belge.
Leur éducation,
mais surtout leurs séjours à l’extérieur des frontières congolaises leurs
permets de comprendre que quelque chose ne tourne pas rond dans leur situation.
Ils décident
alors de prendre leur destin en main. Cette auto-détermination aboutie à la
création d’un premier parti politique nationale dans le pays, le Mouvement
National Congolais (MNC). Sous cette organe, ils exigent au colonisateur ni
plus ni moins que l’indépendance totale et immédiate.
Un membre de
cette belle jeunesse s’appelle Albert Kalonji.
Jusqu’en avril
2015, il était le dernier survivant de ces jeunes qu’on appelle aujourd’hui les pères de l’indépendance.
Retour sur un
individu polarisant.
D’Albert Kalonji à Ditunga Mulopwe (1929-2015)
Albert Kalonji
était un individu polarisant, les commentaires à son sujet sont aux antipodes. Grand
nationaliste pour les uns, tribaliste pur et dur pour les autres. L’histoire
tranchera le débat, cette histoire dont il a néanmoins écrit une page.
Né
Albert Kalonji, il décède avec deux noms en plus ; Ditunga Mulopwe. Il hérite
du titre « Mulopwe » à 31 ans quand les
chefs coutumiers Baluba du Kasaï oriental décident de faire de lui « le
chef des chefs » afin qu’ils les représentent devant différentes instances.
Lors de
l’intronisation à ce statut, il y a un certain rituel qui va comme suit ; le
nouvel élu est assis sur une chaise alors qu’il est transporté sur les épaules
de plusieurs personnes qui effectuent un parcours. À la fin du circuit lorsqu’on
le dépose à terre, Kalonji s’exclame « ditunga », signifiant pays en Tshiluba. C’est à partir de ce
moment qu’il faudra désormais le présenter comme Albert Kalonji Ditunga
Mulopwe.
Allié et rival de Patrice Lumumba
Membre influent
du MNC qu’il a rejoint quelques temps après sa fondation, il est l’allié de Patrice
Lumumba avec qui il partage les idées. Il sera même de ceux qui mirent d’énormes
pressions à la table ronde de Bruxelles afin que Lumumba soit libéré de prison
pour qu’il puisse participer aux négociations pré indépendance.
Mais l’animosité
ne tarde pas entre les deux hommes au fur à mesure que les événements avancent.
Le fond du problème est une guerre de leadership. Dans plusieurs entrevues
vidéos et son livre-mémoire la Sécession
du Sud-Kasaï, la vérité du Mulopwe,
Kalonji règle ses comptes avec le désormais héros national Congolais.
Albert Kalonji écrit
qu’il aurait souhaité qu’un congrès au MNC désigne le leader. Selon ses dires,
Lumumba n’était qu’un président provisoire, nommé parce qu’il avait plus de
temps que les autres. Le Mulopwe reproche à Lumumba et ses proches dont Thomas
Kanza et son frère Philipe, d’avoir imposé Patrice Lumumba à la tête du parti.
Kalonji fini
par claquer la porte et fonde son propre MNC, le MNC-Kalonji. Quelque temps
plus tard, à la tête de cette nouvelle aile, il est chef de l’opposition au
premier parlement du Congo post indépendance. Il a en face de lui le premier
premier ministre du pays, nul autre que Patrice Lumumba. Kalonji tente alors de
faire tomber le gouvernement Lumumba mais il n’en aura pas l’occasion, le
parlement ferme ses portes et les parlementaires sont envoyés en vacances. Les
raisons de cette fermeture prématurée diffèrent.
1960 : L’année de tous les dangers
1960 fût l’année
de tous les dangers pour Albert Kalonji. D’un côté il est impliqué dans les
intenses négociations avec la Belgique pour l’indépendance du Congo, de l’autre
il est aux premières lignes du conflit Lulua vs Baluba qui s’intensifie au Kasaï.
Ainsi, à peine
40 jours après la proclamation d’indépendance du Congo, Le Mulopwe proclame une
autre indépendance; celle de l’état minier du Sud-Kasaï, un territoire de 1,5
millions d’habitants.
Ses opposants l’accusent
de vouloir faire sécession pour s’accaparer à lui seul les richesses de cette
partie du pays. L’intéressé se défend en disant qu’il ne cherche qu’à avoir une
société autonome où les Baluba pourront vivre en toute sécurité. Kalonji avance
que le peuple Luba est persécuté dans tout le pays et même au Kasaï. Il croit
que son nouveau pays, le Sud-Kasaï,
serait la seule terre où ceux-ci trouveront la paix.
Mais quelques
mois plus tard, le conflit Lulua vs Baluba est réglé. Un règlement scellé autour
d’un pacte qui maudirait tous les descendants Lulua-Baluba qui tenterait de
reprendre les hostilités.
La tentative
indépendantiste de Kaloni pris aussi fin, mâtée par la nouvelle armée nationale
du pays. S’ensuit l’exile du Mulopwe, d’abord en Belgique et ensuite à
Barcelone en Espagne.
L’homme mystique
Albert Kalonji
n’a jamais caché son adhésion à l’occultisme. Il était membre actif de l’ordre
de la Rose-Croix (AMORC). En tant que Rosicrucien, il dit avoir appris à devenir
une sorte de « surhomme ». Cette dimension surnaturelle l’aurais permis de
développer un sens pour prévoir le danger.
La personnalité
qui vient de disparaitre était aussi très initiée dans les traditions mystiques
de son Kasaï natal. Toujours dans
son autobiographie, il raconte avoir complété toutes les étapes d’initiations
au titre de Mulopwe, sauf celle du sacrifice humain.
En fait, l’homme
est mort comme il a vécu ; dans le mystère. Il est décédé un mois avant l’annonce
officielle de sa disparition. Là aussi, il se devait de respecter une autre
tradition.
Né en juin
1929, il aurait soufflé ce mois-ci, sa 86e bougie.
Guy-Serge
Luboya
Un personnage très controversé mais faisant quand même partie de l'histoire..
RépondreSupprimerEn effet !
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