dimanche 1 avril 2018

La révolution inachevée de Chad « Pimp C » Butler…

Chad « Pimp C » Butler en spectacle. 

Né Chad Butler en 1973 dans le sud des États-Unis, le monde, surtout celui du hip-hop, l’a plutôt connu sous son nom de scène : « Pimp C ». 

Rappeur talentueux, pas nécessairement le plus poétique, mais assurément un des plus sincères, Pimp C a fait danser bien des gens par ses rimes profondes, sa voix chantante et son accent « country » qui trahissait ses origines sudistes.

Comme plusieurs rappeurs des US, il était issu d’un milieu modeste et comptait un passé tumultueux rempli d’activités illicites. En fait, Pimp C appartient à cette longue lignée de jeunes de quartiers désœuvrés en proie à la criminalité, qui ont eu pour salut la musique rap comme agent de réintégration sociale.

À la fin des 80, avec son acolyte de toujours, le chanteur « Bun B », le duo forme le groupe UGK qui deviendra une référence dans le milieu hip-hop et une inspiration pour les rappeurs venants du Sud.

À ses débuts, les mélodies de Pimp C sont composées d’expériences de trafic de drogues, proxénétisme et de toutes ces choses qui font courir un loubard : argent, femmes et pouvoir.

En somme, mis à part son charisme indéniable qui le démarque de la masse, Pimp Chad, est un rappeur comme les autres. Rappeur typique jusqu’à un certain jour de janvier 2002 où un fâcheux incident l’envoie derrière les barreaux…


La prison et le réveil spirituel

À quelque chose malheur est bon, dit-on. Comme Malcolm X avant lui, l’élévation de l’esprit de Chad Butler se fera dans l’adversité entre les murs d’un pénitencier. En janvier 2002, il est arrêté pour non-respect des conditions de probation et possession d’arme après une altercation dans un centre commercial.  Il écope d’une sentence de huit ans, et en fera finalement quasiment quatre.

Pour rester loin des nombreux problèmes de la vie de prisonnier, il travaille à la bibliothèque de l’établissement, et y passe le clair de son temps.

À sa libération en décembre 2005, c’est un homme nouveau qui revoit le soleil. Pimp C semble avoir compris des principes durant son isolement et est animé d’une volonté de puissance, mais ne sait par où commencer.

Peu de temps après avoir repris sa liberté, il réalise la chanson « Living this life », où il manifeste son désir de changement. Toujours dans le même titre, il évoque avoir lu « l’équivalent de quatre bibliothèques », et en profite pour ridiculiser ce mythe raciste qui voudrait que lorsque l’on veut cacher quelque chose à un noir il faille le mettre dans un bouquin.

Le chanteur va jusqu’à citer certains des livres qui l’on marqués dont : Behold a pale horse, The 48 laws of power et Secrets societies of America.    

Il entreprend aussi, petit à petit, de délaisser son surnom « Pimp » pour un autre moins péjoratif.


Pimp C attaque ses pairs

Chad Butler se fait de plus en plus critique de ses propres frères de micro. Il reproche à beaucoup de rappeurs de ne pas être éveillés et de tomber dans le jeu des maisons de disques. En effet, pour fins de concurrence, jalousie ou autre, beaucoup de rappeurs se détestent et maintiennent d’intenses rivalités qui frôlent la menace de l’intégrité physique.

Pour Butler, ce sont les grandes sociétés gérantes de ces rappeurs qui alimentent et maintiennent ce climat afin d’éviter la collaboration des artistes et l’autogestion de leurs carrières.

Dans un effort d’autodétermination, il réussit à réconcilier plusieurs rappeurs et tente de les convaincre de l’importance de l’unité pour devenir maître de leurs destins.

Mais, Butler ne s’arrête pas là, il tire à boulets rouges sur l’élite du hip-hop.

Le 24 juillet 2007, en entrevue dans une radio d’Atlanta, la 107.9, les auditeurs ont droit à un Chad Butler surexcité.  L’homme, visiblement énervé, accuse de grands noms du hip-hop d’êtres menteurs et hypocrites. En plus d’écorcher quelques personnalités du milieu comme le producteur Russel Simmons et les artistes Young Jeezy et Ne-Yo, il affirme détenir des informations accablantes sur certains grands dirigeants du domaine, mais refuse de les divulguer par respect pour la vie privée de ces derniers.


Son corps retrouvé inerte dans une chambre d’hôtel..

Le 4 décembre 2007, le corps de Chad « Pimp C » Butler est retrouvé inerte dans une chambre d’hôtel de Los Angeles où l’artiste était de passage dans le cadre d’une tournée. Sa mort est confirmée et l’autopsie officielle révèle qu’un mélange de codéine et un trouble de l’apnée du sommeil ont eu raison de l’enfant terrible du hip-hop. Il était mari, père de famille et à peine âgé de 33 ans.


En conclusion

Il y a quelques années, le célèbre trompettiste Quincy Jones écrivait ceci en rendant hommage au rappeur Tupac Shakur décédé à 25 ans, « Si nous avions perdu Oprah à 25 ans, nous aurions perdu une personne de relativement inconnu, une présentatrice locale. Si nous aurions perdu Malcolm X à 25 ans, nous aurions perdu un lascar du surnom de « Detroit Red », si j’avais quitté le monde à 25 ans, nous aurions perdu un joueur de trompète et aspirant compositeur ».

Ceci résume merveilleusement bien ce que le monde a perdu en 2007 avec la disparition de Chad Butler, fauché pendant sa métamorphose révolutionnaire.

Les rappeurs constituent la carte cachée du militantisme aux États-Unis. Ils peuvent sortir de nulle part, s’inviter à une table où ils ne sont pas attendus et secouer sérieusement l’ordre établi. Leur pouvoir de propagande, leur franc-parler déconcertant, leur proximité avec le peuple et le puissant effet de la musique sur le cerveau humain, en font de potentiels imposants acteurs de changements.  

Il reviendra aux nouvelles grosses pointures du hip-hop de continuer l’œuvre de Chad « Pimp C » Butler..


Mayamba Luboya

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